Chrétiens et juifs s’accordent à appliquer ce beau Psaume ainsi que les sept suivants à Jésus-Christ et à son royaume. « Tous ces Psaumes (dit le rabbin Kimchi) regardent l’avenir et parlent des jours du Messie. » « Nous avons ici (dit Luther) une prophétie sur le royaume du Christ. » Seulement il ne faudrait pas trop spiritualiser, comme si cette prophétie se trouvait épuisée par la première venue du Messie et par les conquêtes que l’Évangile a faites jusqu’ici sur la terre ; nous croyons plutôt qu’elle n’aura son plein et véritable accomplissement qu’au moment où notre Seigneur redescendra du ciel au son de la trompette pour entrer en possession de son royaume (1 Th 4.16), et où d’un bout du monde à l’autre retentira ce cri de réjouissance par lequel commence notre Psaume, et qui se trouve répété dans les suivants Ps 96.10, 97.1, 99.1. L’Éternel règne. Alors, comme l’annonce le livre de l’Apocalypse, « les royaumes du monde seront soumis à notre Seigneur et à son Christ » (Ap 11.15). Toutefois, en attendant cette grande et bienheureuse époque, nous pouvons fortifier notre foi par la méditation de ce Psaume dans tous les combats que l’Église est appelée à soutenir contre ses adversaires. Sous ce rapport on peut le placer à côté du Ps 46, ainsi que des autres Psaumes qui sont relatifs à la royauté de notre Sauveur (45, 72, 110). Mais on n’en fait pas assez usage ; comme Calvin le dit très bien, « tous nous confessons ces choses de la bouche ; mais combien il y en a peu qui opposent réellement ce bouclier à la puissance du monde, de manière à n’avoir aucune crainte! »
Dans l’original, ce Psaume est sans titre. La version des Septante en a ajouté un où il est dit qu’il était composé pour la veille du sabbat, jour où la terre commença à être habitée. C’est une simple supposition.
Verset 1. L’Éternel règne. Il est revêtu de majesté ; l’Éternel s’est revêtu de force, il s’en est ceint ; aussi le monde est ferme, et ne chancèle point.
Le premier hémistiche renferme la proclamation du grand événement que le psalmiste, se plaçant au point de vue prophétique, considère comme venant déjà de s’accomplir. Ces paroles rappellent celles dont on se servait pour annoncer l’avènement des rois en Israël (comp. 2 S 15.10 ; 1 R 1.34). — Le mot hébreu que nous traduisons par majesté signifie proprement hauteur, orgueil ; il est employé dans Ps 17.10, en parlant de l’orgueil des impies ; Ps 89.19, en parlant de l’agitation de la mer. Le psalmiste fait ainsi ressortir le contraste entre la grandeur réelle de Dieu et la puissance imaginaire du monde. — Le troisième hémistiche pourrait aussi se traduire : l’Éternel s’est revêtu (on sous-entend de majesté ; alors il y a répétition); il s’est ceint de force. — Le quatrième hémistiche énonce la conséquence des trois premiers. « Dans les jours du Messie il n’y aura plus de guerre » (Kimchi). C’est la même pensée que dans Ps 46.6-10.
Verset 2. Ton trône est ferme depuis longtemps, de toute éternité tu es!
Comparez Ps 45.7, 90.1 ; Ap 1.8. — Kimchi, les Septante et la version hollandaise rattachent ce verset au précédent et traduisent : Dès lors (savoir depuis que tu es entré dans ton règne) ton trône est fermé, mais le parallélisme est plus favorable à la traduction ordinaire.
Verset 3. Ô Éternel! les fleuves élèvent, les fleuves élèvent leur voix, les fleuves élèvent leur fracas.
Dans ce verset et le suivant, les fleuves et la mer représentent les peuples ennemis de Dieu et de son Église (Kimchi y voit Gog et Magog) ; comme dans Ps 46.4. — Le mot rendu par fracas représente proprement le bruit qui résulte du choc des vagues.
Verset 4. Plus que les voix des grandes eaux, plus que les flots admirables de la mer, l’Éternel est admirable dans les lieux élevés.
Les derniers mots de ce verset rappellent la pensée de Ps 92.9.
Verset 5. Tes témoignages sont très dignes de foi. À ta maison sied la sainteté, ô Éternel! pour des jours prolongés.
Le premier hémistiche reproduit littéralement Ps 19.8, mais ici il faut probablement entendre plus particulièrement par témoignage les promesses de Dieu, les prophéties. — Le peuple de Dieu (sa maison spirituelle) jouissant de si grands privilèges, doit s’appliquer à la sainteté (Ep 5.25) ; cette explication de Horne est plus naturelle que celle de Hengstenberg, qui donne à sainteté le sens d’inviolabilité, et qui voit dans les deux derniers hémistiches une répétition de la promesse.
Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes – Tome 2, p. 137-139