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Commentaire sur le Psaume 68

  1. Pour le Maître-Chantre. Pour David. Psaume. Cantique.
  1. Dieu se lèvera, ses ennemis seront dispersés, et ceux qui le haïssent s’enfuiront devant lui.
  2. Comme la fumée se dissipe, tu dissiperas ; comme la cire se fond devant le feu, ainsi les méchants périront devant Dieu.
  3. Mais les justes pousseront des cris d’allégresse devant Dieu, et goûteront une grande joie.
  1. Pour Dieu, faites entendre des chants, pour son nom des instruments ; frayez un chemin à Celui qui est porté sur les plaines ; son nom est Jah ; réjouissez-vous en sa présence!
  2. Père des orphelins et défenseur des veuves, tel est Dieu dans la demeure de sa sainteté.
  3. Dieu fait revenir à la maison les délaissés, il amène au bonheur les captifs ; les rebelles seuls habiteront un lieu aride.
  1. Ô Dieu, lorsque tu sortis devant ton peuple, lorsque tu l’avanças dans le désert (Sélah),
  2. la terre trembla, et, devant Dieu, les cieux mêmes se fondirent ; il trembla, ce Sinaï, devant Dieu, le Dieu d’Israël.
  3. Tu fis tomber une pluie de bienfaits, ô Dieu : ton héritage, qui était épuisé, tu le ranimas.
  4. Ta troupe demeura en ce lieu ; tu l’avais, ô Dieu, préparé dans ta bonté pour l’affligé!
  1. Le Seigneur donna de quoi parler ; les messagères de bonnes nouvelles sont une grande armée.
  2. Les rois des armées s’enfuient, ils s’enfuient, et celle qui habite la maison distribue le butin.
  3. Lorsque vous reposez entre les bergeries, vous ressemblez à une colombe aux ailes argentées, au plumage jaune d’or.
  4. Lorsque le Tout-Puissant y dispersa les rois, la terre blanchit comme le Tsalmon.
  1. La montagne de Dieu est un mont de Basan, un mont bosselé, un mont de Basan.
  2. Pourquoi, montagnes bosselées, attaquez-vous la montagne que Dieu a choisie pour demeure? Oui, l’Éternel l’habitera à jamais.
  3. Les chariots de Dieu se comptent par vingt mille, par milliers redoublés ; le Seigneur est au milieu d’eux ; le Sinaï est dans le sanctuaire.
  4. Tu es monté en haut, tu as emmené des captifs, tu as pris des dons pour les hommes ; et même chez les rebelles tu habiteras, Éternel Dieu!
  1. Béni soit le Seigneur, jour après jour! Nous charge-t-on, Dieu est notre salut (Sélah).
  2. Dieu nous est un Dieu de délivrance ; et à l’Éternel, au Seigneur, appartiennent les issues de la mort.
  3. Oui, Dieu écrasera la tête de ses ennemis, le crâne chevelu de celui qui marche dans ses crimes.
  4. Le Seigneur dit : Je ramènerai de Basan, je ramènerai des profondeurs de la mer ;
  5. afin que tu baignes ton pied dans le sang, et que la langue de tes chiens se repaisse des ennemis, d’eux.
  1. On contemple tes marches, ô Dieu, les marches de mon Dieu, de mon Roi, dans le sanctuaire.
  2. En tête sont les chantres, après eux les musiciens, au milieu de jeunes vierges jouant du tambourin.
  3. Bénissez Dieu dans les assemblées, le Seigneur, vous qui sortez de la source d’Israël!
  4. Là sont Benjamin, le petit, qui les conduit, les princes de Juda, leur troupe, les princes de Zabulon, les princes de Nephtali.
  1. Ton Dieu a décrété la puissance! Confirme, ô Dieu, ce que tu as fait pour nous!
  2. Dans ton temple, qui domine Jérusalem, tu recevras les offrandes des rois.
  3. Tance la bête des roseaux, l’assemblée des puissants avec les veaux des peuples, qui se prosternent avec des lingots d’argent : disperse les peuples qui se plaisent aux combats!
  4. De grands personnages viendront d’Égypte, l’Éthiopie s’empressera d’étendre ses mains vers Dieu.
  1. Royaumes de la terre, chantez à Dieu, faites résonner les instruments pour le Seigneur (Sélah),
  2. qui est porté sur les cieux, les cieux antiques! Voici, il fait entendre sa voix, une voix éclatante.
  3. Donnez la force à Dieu! Sa splendeur est sur Israël et sa puissance dans les nuées.
  4. Depuis les sanctuaires tu te fais redouter, ô Dieu, Dieu d’Israël! C’est Lui qui donne au peuple force et puissance. Béni soit Dieu!

Ce Psaume est sans contredit l’un des plus beaux monuments de la poésie sacrée des Hébreux, mais il est très difficile à comprendre, à tel point qu’on l’a appelé un sphinx, un labyrinthe. Cette difficulté provient de la présence de plusieurs mots qui ne se retrouvent pas ailleurs dans l’Ancien Testament et dont la signification est incertaine, et plus encore de la rapidité extrême avec laquelle les différentes idées se succèdent l’une à l’autre, sans transition apparente.

Parmi les commentateurs juifs, Jarchi et Abenesra pensent que David composa ce Psaume à l’occasion de l’une des guerres qu’il eut à soutenir depuis son avènement au trône et qu’il voulut fortifier sa foi par le souvenir des grandes choses que l’Éternel avait opérées en faveur de son peuple lors de la sortie d’Égypte, du voyage dans le désert et de la conquête de Canaan. Plusieurs rabbins voient dans ce beau Cantique à la fois des actions de grâces pour le passé et une prophétie concernant un avenir plus ou moins éloigné ; mais tandis que Kimchi n’y voit que la prédiction de la défaite des Assyriens du temps d’Ézéchias, la plupart d’entre eux rapportent cette prophétie à la venue du Messie. C’est à l’opinion de ces derniers que nous nous rangeons.

La supposition que David écrivit ce Psaume en vue d’une guerre qu’il était sur le point d’entreprendre, nous paraît fort naturelle. On pourrait penser, par exemple, qu’il s’agit de l’expédition contre les Syriens et les Moabites, qui est mentionnée dans 2 S 8. Dans l’une des plus anciennes versions de l’Ancien Testament que nous possédions, la version syriaque, ce Psaume est intitulé : « Lorsque les rois se préparaient à faire la guerre contre lui. » Mais ces circonstances historiques ne peuvent être considérées que comme l’occasion du Psaume et elles ne suffisent pas pour l’expliquer. On ne peut pas douter qu’il ne doive être mis au nombre des Psaumes prophétiques et qu’il ne se rapporte aussi bien que les trois précédents à l’établissement du royaume du Messie, dès sa première venue jusqu’à la seconde, lorsqu’on fait attention que le psalmiste annonce la soumission de l’Égypte et de l’Éthiopie et qu’il invite tous les royaumes de la terre à célébrer les louanges du Dieu d’Israël (vv. 31-32), et que l’on voit St-Paul citer le v. 19 comme une prédiction de l’ascension de notre Seigneur. Ep 4.8,10. Il est dit : « Étant monté en haut, il a emmené captive une grande multitude de captifs et il a donné des dons aux hommes. Or, ce qu’il est monté, qu’est-ce autre chose sinon que premièrement il était descendu dans les parties les plus basses de la terre. Celui qui est descendu c’est le même qui est monté au-dessus de tous les cieux, afin qu’il remplît toutes choses. »

Cette explication s’accorde avec celle de Calvin, sauf qu’il considère ce Psaume comme un type plutôt que comme une prophétie proprement dite. « David célèbre la puissance de Dieu dont il avait fait lui-même l’expérience et qui avait été visible pour le peuple entier. Mais il n’est pas douteux qu’il n’ait voulu dépeindre sous ce type la gloire magnifique de Dieu, qui est enfin apparue en Jésus-Christ. » Avec Luther nous dirons : « Ce Psaume parle partout de Jésus-Christ, c’est pourquoi il faut y faire une grande attention, car ce sont des paroles qui ont quelque chose d’étrange quand on les prend à la lettre. » « C’est une prophétie qui nous montre ce que devient le royaume de Jésus-Christ au milieu de ses ennemis jusqu’à leur complète ruine. Nous y voyons les œuvres mer veilleuses qui s’opèrent dans tous les temps, lorsque Dieu se lève et qu’il fait sentir sa présence de manière à épouvanter ses ennemis et à consoler les fidèles » (Rieger).

Parmi les commentateurs modernes, les uns, comme Rosenmüller et Stier, rapportent ce Psaume à la translation de l’arche sur la montagne de Sion (2 S 6), les autres, en grand nombre (De Wette, Hengstenberg, Tholûk, de Gerlach) le croient composé après une victoire remportée par David sur ses ennemis. Hengstenberg pense qu’il s’agit de l’heureuse issue de l’expédition contre les Ammonites et de la prise de Rabba. 2 S 12.26-31. L’explication que nous avons donnée d’après les docteurs juifs nous paraît préférable. Ce Psaume parle bien en effet d’un passé déjà fort éloigné et d’un lointain avenir, mais on n’y trouve pas d’allusion bien positive à quelque victoire récente remportée par le peuple d’Israël sur ses ennemis.

Dans l’Église anglicane le Ps 68 se lit le jour de Pentecôte : c’est en faire un légitime usage, puisque l’envoi du Saint-Esprit peut être considéré comme le principal des dons excellents que le Messie a obtenus pour les hommes par son ascension (v. 19) et qu’il fut préfiguré par la promulgation de l’ancienne loi sur le Sinaï, événement auquel le v. 9 fait allusion (Comp. Jr 31.33 ; 2 Co 3.3).

On peut distinguer dans ce Psaume neuf strophes assez distinctement marquées par le sens et qui probablement devaient être chantées dans le service divin par différents chœurs qui s’entre-répondaient. La première énonce la pensée principale dont les autres donnent le développement, savoir que Dieu triomphera de tous ses ennemis (2-4) ; la seconde est une invitation à louer ce Dieu qui se montre pour son peuple un protecteur fidèle et puissant (5-7) ; la troisième rappelle comment Israël a été conduit depuis l’Égypte jusqu’à la Terre promise (8-11) ; la quatrième nous montre le peuple prenant possession du pays de Canaan (12-15) ; la cinquième célèbre les privilèges de la montagne de Sion dont Dieu a fait sa résidence d’une façon particulière (16-19) ; la sixième promet au peuple de Dieu de nouveaux triomphes dans l’avenir (20-24) ; la septième décrit une fête d’actions de grâces célébrée à l’occasion de ces victoires (25-28) ; la huitième annonce l’entrée des Gentils dans le royaume de Dieu (29-32) ; enfin, dans la dernière, tous les peuples du monde sont invités à joindre leurs adorations et leurs actions de grâces à celles du peuple d’Israël (33-36).

Verset 2. Dieu se lèvera, ses ennemis seront dispersés, et ceux qui le haïssent s’enfuiront devant lui.

Ce verset est une répétition des paroles solennelles que Moïse prononçait dans le désert toutes les fois que le peuple se mettait en mouvement, ayant à sa tête l’arche qui était un symbole de la présence de Dieu : « Lève-toi, ô Éternel, et tes ennemis seront dispersés et ceux qui te haïssent s’enfuiront de devant toi. » Nb 10.35. Le psalmiste n’a fait que changer la forme du premier verbe (il a mis le futur : jakoum, au lieu de l’impératif : kouma), en sorte que les mêmes paroles qui, dans le Pentateuque, expriment un vœu, une prière, se trouvent dans le Psaume énoncer un fait, mais un fait qui s’accomplit tous les jours, en sorte que par là même elles expriment l’espérance, la confiance. « Il faut remarquer la différence qui existe entre les paroles de Moïse et celles de David. Moïse énonce un vœu et il s’adresse directement à Dieu, tandis que David se félicite de ce que ce vœu s’accomplit journellement et de ce que l’expérience confirme ce que Moïse a enseigné » (Calvin). — Sur l’expression « se lever » voyez Ps 3.8, 7.7. — St-Augustin dit que ces paroles s’accomplirent lorsque les ennemis de notre Seigneur furent saisis d’épouvante en le voyant se relever d’entre les morts et sortir de son tombeau.

Verset 3. Comme la fumée se dissipe, tu dissiperas ; comme la cire se fond devant le feu, ainsi les méchants périront devant Dieu.

« Le psalmiste veut montrer par ces comparaisons avec quelle facilité Dieu déjoue toutes les entreprises de nos ennemis. C’est un remède que le Saint-Esprit a voulu nous donner contre les craintes excessives de notre chair » (Calvin). — L’image de la cire qui se fond se retrouve dans Mi 1.4.

Verset 4. Mais les justes pousseront des cris d’allégresse devant Dieu, et goûteront une grande joie.

Sur la joie des justes voyez Ps 58.11 ; Ph 4.4.

Verset 5. Pour Dieu, faites entendre des chants, pour son nom des instruments ; frayez un chemin à Celui qui est porté sur les plaines ; son nom est Jah ; réjouissez-vous en sa présence!

Le troisième hémistiche renferme déjà une allusion au voyage des Israélites dans le désert (idée développée dans la troisième strophe). Le psalmiste se représente l’Éternel s’avançant à la tête de son peuple, et il invite les habitants du désert à frayer le chemin devant le Roi des Rois, de même que les peuples de l’Orient avaient coutume de préparer et avec soin le chemin par lequel de grands personnages devaient passer. Comp. Es 40.3. Toutes les parties de ce verset seraient mieux liées entre elles et l’on serait dispensé d’y introduire une idée qui anticipe sur la strophe suivante, si l’on osait se départir de la signification ordinaire du verbe (salal) auquel nous donnons le sens de frayer le chemin, et le traduire par louer, comme le font les rabbins ; dans ce cas le troisième hémistiche serait une répétition des deux premiers et se traduirait : louez Celui qui est porté sur les plaines. — Nous avons aussi cru devoir conserver au dernier mot de cet hémistiche (haravot) sa signification ordinaire et bien connue. Les rabbins le rendent par cieux ou nuées, et cette traduction pourrait sembler appuyée par le verset 34 où il est dit que Dieu est « porté sur les cieux. » — Le mot Jah est une abréviation du nom de Jéhova (sur lequel voyez l’introduction au Ps 19). Il n’est pas fréquent dans l’Ancien Testament, sauf dans les noms propres dans la composition desquels Jéhova doit figurer, par exemple Jedidjah (Aimé de l’Éternel) qui se compose de jedid (bien-aimé) et Jah (l’Éternel). 2 S 12.25. Cette abréviation est destinée, selon Hengstenberg, à faire ressortir la signification du nom de Jéhova ; les perfections de Dieu sont en quelque manière concentrées dans ce nom court et expressif.

Verset 6. Père des orphelins et défenseur des veuves, tel est Dieu dans la demeure de sa sainteté.

Tout en exprimant une vérité générale, le psalmiste avait toujours plus particulièrement en vue le peuple d’Israël, qui, faible et chétif comme il l’était en Égypte et dans son voyage à travers le désert, pouvait bien être comparé à une veuve et à des orphelins.

Verset 7. Dieu fait revenir à la maison les délaissés, il amène au bonheur les captifs ; les rebelles seuls habiteront un lieu aride.

Le mot hébreu (jekidim) que nous rendons par : les délaissés signifie proprement : ceux qui vivent isolés, les solitaires ; aussi Abenesra et Kimchi disent que le psalmiste veut parler des époux auxquels Dieu accorde des enfants après qu’ils en ont été privés pendant longtemps (comp. 1 S 2.5) ; mais il est plus naturel de penser qu’il s’agit des Israélites dispersés auxquels Dieu veut rendre une patrie ; c’est l’explication des commentateurs modernes. Ces paroles, ainsi entendues, s’appliquent à la fois au passé (sortie d’Égypte) et à l’avenir (retour de Babylone et rétablissement final d’Israël). On peut les appliquer aussi généralement aux pécheurs que leurs transgressions exposent à être abandonnés de Dieu, mais qui, par Jésus-Christ, peuvent être ramenés à la maison paternelle et réintégrés dans la famille de Dieu. Ep 2.12-13.

Verset 8. Ô Dieu, lorsque tu sortis devant ton peuple, lorsque tu l’avanças dans le désert (Sélah),

Depuis ce verset, les allusions à la sortie d’Égypte et au voyage à travers le désert sont plus distinctement marquées. « La sortie d’Égypte étant un gage éclatant de l’amour de Dieu, le psalmiste en raconte succinctement l’histoire. Dans cette mémorable sortie, Dieu a montré à tous les siècles combien il aime son Église. » (Calvin). — En composant ce verset et le suivant, David peut avoir eu l’intention de reproduire un beau passage du cantique de Débora. Jg 5.4-5.

Verset 9. la terre trembla, et, devant Dieu, les cieux mêmes se fondirent ; il trembla, ce Sinaï, devant Dieu, le Dieu d’Israël.

On ne peut douter qu’il ne soit question dans ces paroles des grands bouleversements de la nature qui précédèrent et accompagnèrent la promulgation de la loi sur le Sinaï. Ex 19.16-18. — Les mots : les cieux se fondirent font, selon Hengstenberg, allusion à une pluie abondante qui sortit des épaisses nuées dont parle le récit de Moïse (Ex 19.16) ; nous croyons qu’il s’agit plutôt de la pluie de bienfaits dont le psalmiste lui-même parle dans le verset suivant.

Verset 10. Tu fis tomber une pluie de bienfaits, ô Dieu : ton héritage, qui était épuisé, tu le ranimas.

La pluie de bienfaits désigne non seulement l’envoi de la manne, dont il est dit que Dieu la ferait pleuvoir (Ex 16.4), mais tous les autres moyens par lesquels Dieu a pourvu aux besoins de son peuple pendant le voyage à travers le désert. « C’est le cours perpétuel de la grâce de Dieu » (Calvin). — Nous avons dit à l’occasion de Ps 28.9 ce qu’il faut entendre par l’héritage de Dieu.

Verset 11. Ta troupe demeura en ce lieu ; tu l’avais, ô Dieu, préparé dans ta bonté pour l’affligé!

La troupe désigne le peuple d’Israël. — Le psalmiste indique le pays de Canaan par l’expression vague en ce lieu (en hébreu il n’y a même qu’un simple pronom après la préposition), parce que ce pays-là se présentait à son esprit comme le terme du voyage. Stier croit qu’il s’agit encore du désert, mais la première explication nous paraît plus naturelle. Il est vrai que la conquête du pays de Canaan n’est racontée que dans la strophe suivante ; mais elle peut très bien être mentionnée brièvement à la fin de celle qui se rapporte au voyage dans le désert. — Dans le second hémistiche, le verbe est sans régime : tu avais préparé. Nous avons traduit comme s’il fallait sous-entendre : le pays ; mais on pourrait aussi sous-entendre : de la nourriture, des secours, des bienfaits.

Verset 12. Le Seigneur donna de quoi parler ; les messagères de bonnes nouvelles sont une grande armée.

La plupart des commentateurs pensent qu’il s’agit de la défaite des rois du pays de Canaan lors de la conquête. — Allusion au rôle que les femmes jouaient chez les Israélites dans les réjouissances publiques : comp. Ex 15.20 ; Jg 11.34 ; 1 S 18.6-7.

Verset 13. Les rois des armées s’enfuient, ils s’enfuient, et celle qui habite la maison distribue le butin.

Dans le second hémistiche, il est question de la part que les femmes prenaient au partage du butin ; mais on pourrait traduire aussi : celle qui fait l’ornement de la maison.

Verset 14. Lorsque vous reposez entre les bergeries, vous ressemblez à une colombe aux ailes argentées, au plumage jaune d’or.

Ce verset a beaucoup occupé les commentateurs. Ils sont surtout divisés au sujet d’un mot qui termine le premier hémistiche et qui ne se retrouve que dans un seul passage de l’Ancien Testament, Ez 40.43. La signification bergeries, également adoptée par De Wette et Perret-Gentil, nous a paru la plus probable, à cause de la ressemblance frappante qui existe entre ce mot (chepataïm) et un autre mot (michepataïm) que l’on rencontre dans le testament prophétique de Jacob (Gn 49.14) et dans le cantique de Débora (Jg 5.16) et qui est connu comme signifiant : bergerie, enclos pour le bétail. Ce qui milite aussi en faveur de cette signification, c’est qu’elle se rapproche beaucoup de celle qui est proposée par le rabbin Jarchi et adoptée par Stier et Hengstenberg : limites, frontières. Si l’on adopte cette traduction, voici comment on pourrait paraphraser ce verset : « Ô Israélites, lorsqu’au retour de la victoire vous vous êtes trouvés en paisible possession du pays de Canaan, établis au milieu de vos troupeaux et enrichis des dépouilles de vos ennemis, vous ressembliez à une colombe au brillant plumage. » Parmi les autres significations qui ont été proposées pour le mot en question, celle que nous préférerions en seconde ligne est celle que lui donnent l’ancienne version chaldéenne, les rabbins Abenesra et Kimchi, Calvin et la version anglaise, savoir celle de chenets, à laquelle se rattache, par association d’idées, celle de noirceur, saleté. Si cette traduction était juste, le psalmiste aurait voulu dire que, lors même que le peuple d’Israël serait plongé dans les ténèbres de l’affliction, couvert d’opprobre et profondément humilié, Dieu pouvait en un moment changer son sort et le faire ressembler à une colombe au riche plumage. La colombe (image du fidèle, comp. Ps 55.7 et titre du Ps 56), fût-elle couchée au milieu des chenets, n’en sortira point noircie, elle n’y perdra rien de son éclat. « Bien qu’il arrive quelquefois aux fidèles d’être couchés dans les ténèbres, Dieu se montre leur libérateur » (Calvin). Cette idée est juste en elle-même, mais elle se rattache d’une manière moins naturelle au verset précédent qui parle du partage du butin.

Verset 15. Lorsque le Tout-Puissant y dispersa les rois, la terre blanchit comme le Tsalmon.

Ce verset est également très difficile à cause de sa grande confusion ; en hébreu il ne se compose que de six mots. L’incertitude porte aussi sur le dernier mot du verset. Il peut être considéré comme un nom propre, celui d’une montagne dans le voisinage de Sichem, mentionnée dans Jg 9.48 (c’est l’opinion d’Abenesra, Calvin, De Wette, Hengstenberg), ou comme un substantif signifiant les ombres, les ténèbres (c’est l’opinion de Kimchi et d’autres commentateurs juifs, ainsi que de Rosenmüller). Nous préférons la première explication. Il nous paraît probable que si le psalmiste avait voulu exprimer l’idée d’ombre, il aurait employé quelqu’un des mots plus connus qui sont usités en hébreu pour rendre cette idée (par exemple, tselem, tsalmavet). — Ensuite on se demande qui sont les rois dont il est question dans le premier hémistiche? Stier croit que le psalmiste veut parler des chefs et princes israélites auxquels Dieu donna le gouvernement du pays de Canaan. Nous pensons avec la plupart des commentateurs, qu’il s’agit plutôt de ces mêmes rois ennemis, mis en fuite par la puissance de Dieu, qui sont mentionnés au v. 13. — On s’accorde généralement à penser que la contrée dans laquelle la dispersion a lieu est le pays de Canaan[1]. — Le second hémistiche se traduit littéralement : elle (la terre) fut blanchie de neige sur le Tsalmon[2]. On pense généralement que le psalmiste ne veut pas parler d’une neige réellement tombée sur le Tsalmon, mais qu’il veut dire que le pays devint blanc comme le Tsalmon quand il y neige et que cette image est destinée, aussi bien que celle de la colombe aux brillantes couleurs, à représenter l’état de splendeur et de prospérité dans lequel se trouva le peuple d’Israël après la conquête du pays de Canaan. Cette explication nous paraît plus simple que celle de De Wette et de Tholûck qui croient que le psalmiste a voulu dire que le pays de Canaan devint tout blanc d’ossements, tant était considérable le nombre des morts, de même que Virgile dit : campi ingentes ossibus albent. Énéide XII, 36. — On peut enfin se demander pourquoi le psalmiste compare le pays étincelant de neige au Tsalmon, plutôt qu’à telle autre montagne? Le Tsalmon était une montagne peu élevée, mais on peut inférer du passage du livre des Juges où elle est mentionnée, qu’elle était couverte de forêts qui lui donnaient probablement un aspect sombre, et l’on peut supposer que cette circonstance lui avait mérité le nom de Tsalmon, qui en hébreu rappelait l’idée de ténèbres (comme nous dirions : le Mont-Noir). Or, de même que cette montagne, ordinairement triste et sombre, devenait resplendissante aussitôt qu’elle se couvrait de neige, Dieu avait fait passer son peuple des ténèbres de l’affliction au jour brillant de la prospérité.

Verset 16. La montagne de Dieu est un mont de Bassan, un mont bosselé, un mont de Bassan.

Le poète sacré, après avoir achevé d’esquisser à grands traits l’histoire de la sortie d’Égypte et de la conquête, commence à parler de l’époque à laquelle il vivait lui-même, et il fait allusion au rôle important qui était assigné à la montagne de Sion, surtout depuis que l’arche y avait été transportée (Comp. nos explications sur Ps 2.6). — Pour exprimer par une image la supériorité de la montagne de Sion sur toutes les autres, il l’appelle un mont de Bassan, parce que le pays de Bassan était renommé pour sa fertilité (Comp. Ps 22.13). — La montagne de Sion est aussi appelée mont bosselé (en hébr. mont à plusieurs cimes), parce que le psalmiste voulait parler de l’ensemble des collines sur lesquelles Jérusalem était bâtie ; l’une d’entre elles était la montagne de Sion proprement dite ; mais son nom était quelquefois donné à l’ensemble (Voyez Géographie de la Palestine, par Raumer, p. 195 et 242). — Hengstenberg adopte pour ce verset une traduction différente, qui est également autorisée par la grammaire, et d’après laquelle ce n’est pas la montagne qui est le sujet du verset mais le mont de Bassan : Le mont de Bassan est une montagne de Dieu (c’est-à-dire, une montagne excellente, remarquable, comp. Ps 36.7), le mont de Bassan est une montagne bosselée. Si ce verset devait se traduire ainsi, il faudrait supposer que le psalmiste a eu l’intention de faire remarquer que bien que le mont de Bassan fût une montagne riche et fertile, elle ne pouvait point entreprendre de se mesurer avec la montagne de Sion. Comme dans le langage de l’Écriture les montagnes représentent souvent des royaumes, David aurait donc voulu dire que bien que les royaumes de ce monde jouissent quelquefois d’une grande prospérité, ils devront céder le pas au royaume de Dieu. Cette idée est juste, mais elle ne se rattache pas au contexte d’une manière aussi naturelle que celle qui se trouve exprimée par notre traduction (privilèges de la montagne de Sion).

Verset 17. Pourquoi, montagnes bosselées, attaquez-vous la montagne que Dieu a choisie pour demeure? Oui, l’Éternel l’habitera à jamais.

Dans ce verset, le psalmiste s’adresse aux royaumes de ce monde (représentés par les monts de Bassan), et il veut leur faire sentir combien serait vaine l’opposition qu’ils tenteraient contre le royaume de Dieu. C’est la même pensée que dans Ps 2.1-3. « Les fidèles devraient se contenter de la prérogative que Dieu leur accorde en faisant sa demeure au milieu d’eux » (Calvin). — Quand le Saint-Esprit représente les royaumes du monde comme une montagne à plusieurs cimes, n’a-t-il point voulu faire allusion aux sept montagnes sur lesquelles sera assise la femme de l’Apocalypse? Ap 17.9.

Verset 18. Les chariots de Dieu se comptent par vingt mille, par milliers redoublés ; le Seigneur est au milieu d’eux ; le Sinaï est dans le sanctuaire.

Le psalmiste voulant donner une idée de la puissance que Dieu déploie dans tous les temps pour protéger son peuple contre ses ennemis, le compare à un roi qui peut disposer de nombreux chariots de guerre (Comp. Ex 14.7 ; Ha 3.8). — Le troisième hémistiche signifie que la puissance que l’Éternel avait déployée autrefois sur le mont Sinaï d’une manière si éclatante (comp. vv. 8-9), s’exerçait maintenant dans le sanctuaire bâti sur la montagne de Sion, c’est-à-dire que c’était là que Dieu exauçait d’une façon toute spéciale les prières de son peuple, de là qu’il lui envoyait son secours.

Verset 19. Tu es monté en haut, tu as emmené des captifs, tu as pris des dons pour les hommes ; et même chez les rebelles tu habiteras, Éternel Dieu!

Le psalmiste se représente l’Éternel retournant dans son temple céleste après avoir combattu sur la terre pour son peuple (image qui se trouve déjà Ps 7.8) et mettant celui-ci en possession des fruits de la victoire[3], enfin lui accordant de nouveaux témoignages de sa bonté. Mais dans ce passage il s’agit d’une victoire beaucoup plus considérable que toutes celles dont David pouvait avoir été témoin ou qui avaient eu lieu dans les temps passés, savoir de celle que Dieu devait remporter dans la personne du Messie, sur le péché, sur la mort et sur le Prince des ténèbres. St-Paul nous enseigne en effet que ces remarquables paroles sont une prophétie de l’ascension de notre Seigneur et de la fondation de l’Église chrétienne par l’effusion du Saint-Esprit. Ep 4.9-15. Ce verset, ainsi expliqué, se rattache sans difficulté à ceux qui le précèdent et qui le suivent. Nous pourrons donc nous dispenser de discuter l’opinion de Kimchi qui l’applique à Moïse montant sur le Sinaï pour y chercher le précieux trésor de la loi, et celle d’Abenesra qui l’applique à David gravissant la montagne de Sion après une de ses victoires. — Il nous reste à expliquer quelques-uns des détails de ce passage. — Les mots : tu es monté en haut, doivent être rapprochés de la prophétie de Ps 110.1. « L’Éternel a dit à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que j’aie mis tes ennemis pour le marchepied de tes pieds. » — Les mots : tu as emmené des captifs (littéralement : tu as fait captifs des captifs), nous paraissent expliqués d’une manière fort heureuse par ces paroles du Cantique qui se chante dans nos Églises le jour de l’Ascension :

Il monte au ciel, porté sur une nue,

Et tout en lui nous marque sa grandeur.

Satan soumis, la mort même vaincue,

Sont les captifs qui suivent ce vainqueur.

Le second hémistiche a été traduit de différentes manières, parce que la préposition hébraïque (be) qui est placée devant le mot hommes a des significations assez nombreuses. Au point de vue grammatical on peut justifier la traduction de De Wette : tu as pris des dons en hommes (c’est-à-dire : qui consistent en hommes ; il s’agirait alors des cœurs que Jésus-Christ s’assujettit par sa grâce), et celle de Hengstenberg : tu as pris des dons des hommes (c’est-à-dire, de la part des hommes). Mais la traduction que nous donnons est celle qui se rattache de la manière la plus naturelle au contexte ; c’est celle de la version chaldéenne et du rabbin Jarchi, et elle se trouve sanctionnée par l’autorité de St-Paul qui l’a adoptée dans la citation qu’il fait de ce passage. Ep 4.8. Ces biens que le Messie a acquis par sa victoire et qu’il distribue parmi les hommes sont la réconciliation avec Dieu, le pardon des péchés, les secours du St-Esprit, en un mot, tous les dons spirituels qui sont nécessaires pour chaque fidèle et pour l’Église dans son ensemble ; c’est pourquoi l’apôtre mentionne cette prophétie au moment où il se prépare à parler de l’institution et du maintien du ministère évangélique. — Le dernier hémistiche est assez obscur, ce qui tient à son extrême concision ; voici sous quelle forme il se présente en hébreu : même les rebelles, pour demeurer, Éternel, Dieu. Il est évident d’après le contexte que c’est de rebelles convertis que le psalmiste veut parler, d’hommes qui ont été rebelles et qui ont cessé de l’être. Mais il s’agit de savoir si les mots : et même les rebelles, doivent être considérés comme liés à l’hémistiche précédent, comme le pensent Calvin, Hengstenberg et Stier ; on traduit alors : tu as pris des dons pour les hommes et même pour les rebelles. Nous avons préféré la traduction qui est donnée par la version chaldéenne et adoptée par De Wette, parce que la ponctuation indique que le troisième hémistiche doit être détaché du second ; il est d’ailleurs probable que l’auteur aurait répété devant rebelles la préposition (pour) qui se trouve devant hommes, s’il avait voulu que ces deux substantifs fussent régis par elle. — Il faut encore déterminer à quoi se rapportent les mots pour demeurer? Le psalmiste a-t-il voulu dire que l’Éternel demeurera au milieu des rebelles (version chaldéenne, Stier, Clauss), ou bien que les rebelles demeureront auprès de Dieu (De Wette)? C’est la première explication que nous avons adoptée, attendu que l’idée que Dieu viendra établir sa demeure au milieu de son peuple, dans son sanctuaire, se trouve déjà au v. 17. Hengstenberg qui rattache les mots : et même les rebelles à l’hémistiche précédent, rapporte à l’Éternel les mots : pour habiter, et il traduit : afin que tu habites (on sous-entend : dans le ciel, en paix et en gloire) ô Éternel, Dieu. Mais cette explication nous paraît peu naturelle. — Il nous reste à faire remarquer que St-Paul en citant ce passage y a fait un léger changement ; il dit : il a donné des dons aux hommes. Mais ce changement était légitime, car le verbe hébreu (laquak) que l’on rend ordinairement par : prendre ou recevoir, signifie aussi : prendre pour distribuer. — En hébreu le mot Éternel est abrégé dans ce verset aussi bien qu’au v. 5 (Jah).

Verset 20. Béni soit le Seigneur, jour après jour! Nous charge-t-on, Dieu est notre salut (Sélah).

Ce verset et les suivants jusqu’à la fin du Psaume exposent les conséquences de la grande victoire qui se trouvait annoncée dans le verset 19. Ce tableau prophétique trouve son accomplissement dans l’extension graduelle du christianisme sur la terre ; il le trouvera surtout lors des dernières luttes que le peuple d’Israël aura à soutenir contre ses ennemis avant sa délivrance finale. — Les afflictions, surtout celles que nous occasionne la méchanceté des hommes, sont également représentées sous l’image d’un fardeau dans Ps 66.11.

Verset 21. Dieu nous est un Dieu de délivrance ; et à l’Éternel, au Seigneur, appartiennent les issues de la mort.

En hébreu le mot délivrance est au pluriel, probablement afin de donner à entendre que les moyens par lesquels Dieu délivre les fidèles sont nombreux et variés. — La mort dont il est question ici, n’est pas celle du corps seulement. Ces paroles nous rappellent aussi que Jésus-Christ est appelé « celui qui tient les clefs de l’enfer et de la mort. » Ap 1.18. — La préposition qui se trouve en hébreu devant le mot mort peut se prendre dans des sens très divers ; celui que nous lui avons donné (issue quant à la mort) est celui qui va le mieux dans le contexte et qui forme le meilleur parallélisme avec le premier hémistiche. Les commentateurs juifs traduisent : À l’Éternel, au Seigneur, il appartient de faire sortir pour la mort (c’est-à-dire de faire sortir Israël pour porter la mort chez ses ennemis).

Verset 22. Oui, Dieu écrasera la tête de ses ennemis, le crâne chevelu de celui qui marche dans ses crimes.

On peut rapprocher de ce verset les passages suivants qui annoncent la défaite de l’Antichrist, Ps 110.6 ; 2 Th 2.8, et celle de Satan, Gn 3.15 ; Ap 12.9.

Verset 23. Le Seigneur dit : Je ramènerai de Bassan, je ramènerai des profondeurs de la mer ;

De Wette et Hengstenberg appliquent ce verset aux ennemis d’Israël que Dieu veut châtier et que, dans ce but, il fera revenir des lieux les plus éloignés où ils auraient cherché un refuge ; ce serait une prédiction semblable à celle de Joël 3.2. Nous pensons, comme la plupart des commentateurs, qu’il s’agit plutôt du peuple d’Israël qui sera ramené de l’exil. Comp. Es 49.12. Le pays de Bassan, où Israël avait eu à combattre les rois Og et Sihon, et les profondeurs de la mer représentent les grandes difficultés que l’Éternel vaincra par sa puissance pour délivrer son peuple. Cette prophétie, accomplie partiellement lors du retour de la captivité de Babylone, le sera plus complètement lorsque Dieu mettra fin à la dispersion actuelle des enfants d’Israël.

Verset 24. afin que tu baignes ton pied dans le sang, et que la langue de tes chiens se repaisse des ennemis, d’eux.

Le second hémistiche est très concis dans l’original ; il ne renferme que ces mots : la langue de tes chiens, des ennemis, de lui. Il faut nécessairement suppléer un verbe ; celui que nous avons exprimé paraît indiqué par le contexte ; on pourrait aussi sous-entendre celui qui se trouve dans le premier hémistiche. — Nous avons considéré le dernier mot du verset (minehou) comme composé d’une préposition et d’un pronom ; en hébreu ce pronom est au singulier, probablement parce que la pensée du psalmiste se porte sur chacun des ennemis. Mais ce mot peut aussi être envisagé comme composé d’un substantif (portion) et d’un pronom ; dans ce cas, le pronom se rapporte à la langue des chiens et il faut traduire : et que la langue de tes chiens ait sa part des ennemis. — Ces paroles s’accomplirent lorsque les chiens léchèrent le sang de l’impie Achab. 1 R 22.38. La chair des ennemis sera dévorée par des oiseaux de proie à la suite des combats qui auront lieu dans les derniers temps entre le peuple du Messie et celui de l’Antichrist. Ap 19.17-18.

Verset 25. On contemple tes marches, ô Dieu, les marches de mon Dieu, de mon Roi, dans le sanctuaire.

Ce verset et les trois suivants décrivent une fête d’actions de grâces que le peuple d’Israël célébrera après une grande victoire (probablement à l’époque de son rétablissement définitif). — Les processions (en hébreu les marches) dont il s’agit sont celles du peuple qui arrive au temple.

Verset 26. En tête sont les chantres, après eux les musiciens, au milieu déjeunes vierges jouant du tambourin.

Hengstenberg fait remarquer que les chantres sont placés en tête de la procession afin de marquer que c’est à l’élément spirituel (la parole) qu’appartient toujours la première place dans le service divin. — Le psalmiste avait déjà parlé au verset 12 de la part que les femmes prenaient chez les Israélites aux réjouissances religieuses. — Le tambourin, cercle de bois ou de métal, recouvert d’une peau et garni de clochettes. En Espagne, cet instrument de musique est encore connu sous son nom arabe d’aduffa, qui a un rapport évident avec celui qu’il porte en hébreu (tof).

Verset 27. Bénissez Dieu dans les assemblées, le Seigneur, vous qui sortez de la source d’Israël!

Cette image d’une source, pour représenter le peuple, se retrouve dans Es 48.1. « Il faut que tous ceux qui tirent leur origine du saint patriarche Jacob se réunissent pour louer Dieu » (Calvin).

Verset 28. Là sont Benjamin, le petit, qui les conduit, les princes de Juda, leur troupe, les princes de Zabulon, les princes de Nephtali.

Le psalmiste indique la place que les représentants des différentes tribus occuperont dans la procession. Mais il n’en nomme que quatre. Hengstenberg pense qu’il s’agit de celles qui se seront particulièrement distinguées dans le combat. Nous croyons plutôt, comme Stier, qu’il mentionne d’une part celles qui étaient les plus rapprochées du temple (Benjamin et Juda) et de l’autre celles qui en étaient les plus éloignées (Zabulon et Nephtali), afin de représenter la totalité des tribus, le corps du peuple. — Benjamin est appelé le petit, probablement parce que Benjamin était le cadet des fils de Jacob ; d’autres pensent que c’est parce que le territoire de cette tribu occupait fort peu d’étendue. — Il est aussi appelé : celui qui les domine. Hengstenberg rapporte le pronom aux ennemis ; il nous paraît plus simple de le rapporter aux Israélites et d’y voir une allusion au fait que Saül, premier roi d’Israël, appartenait à cette tribu. — Le dernier mot du troisième hémistiche (rigema), a été traduit de diverses manières. Il ne se trouve pas ailleurs dans l’Ancien Testament, mais il est dérivé d’un verbe bien connu qui signifie amasser et qui est employé plusieurs fois avec le mot pierre, pour désigner le supplice de la lapidation. Nb 14.10 ; Ez 23.47, etc. Hengstenberg conserve au mot en question le sens de lapidation et traduit : les princes de Juda, qui les lapident (c’est à dire les ennemis) ; mais il est plus naturel d’adopter le sens d’amas, troupe, qui est donné par De Wette et Stier, et de penser que le psalmiste a voulu faire allusion au grand nombre de personnages distingués par leur rang que renfermait la tribu de Juda. — Plusieurs commentateurs, même de ceux qui ne sont nullement portés à voir partout des types, font remarquer que St-Paul qui fut au premier rang parmi les Apôtres se trouvait être de la tribu de Benjamin (Rm 11.1), que Jacques, fils d’Alphée et parent de notre Seigneur, était de la tribu de Juda et que les autres Apôtres appartenaient peut-être aux deux autres tribus nommées dans ce verset, puisqu’ils étaient Galiléens. Ces paroles prophétiques pourraient donc avoir trouvé un premier accomplissement dans la prédication des Apôtres ; elles s’accompliront également lorsque ces mêmes Apôtres siégeront sur des trônes, jugeant les douze tribus d’Israël. Mt 19.28.

Verset 29. Ton Dieu a décrété la puissance! Confirme, ô Dieu, ce que tu as fait pour nous!

Dans la première partie de ce verset, le psalmiste s’adresse à Israël pour lui rappeler les promesses de Dieu ; la seconde est une prière dans laquelle il demande à Dieu de continuer l’œuvre qu’il a commencée en faveur de son peuple.

Verset 30. Dans ton temple, qui domine Jérusalem, tu recevras les offrandes des rois.

Nous n’avons pas pu traduire ce verset d’une manière entièrement littérale. En hébreu il se trouve sous cette forme : De ton temple sur Jérusalem des rois t’apporteront des offrandes. La plupart des commentateurs donnent à la préposition (min) qui précède les mots ton temple, le sens : à cause de, et rapportent ces paroles aux hommages que les rois des Gentils doivent rendre un jour au vrai Dieu et à son sanctuaire (Comp. Es 60.10-42 ; Ap 21.24). Cette traduction est admissible et préférable en tout cas à celle de Calvin et de De Wette qui, s’écartant de la ponctuation reçue, rattachent le premier hémistiche au verset précédent. Nous préférons laisser à la préposition en question le sens qu’elle a le plus ordinairement (hors de, depuis), et nous pensons que le psalmiste a voulu dire que c’est dans le temple de Jérusalem que Dieu se trouvera (présent quoique invisible) lorsque les rois lui apporteront des offrandes. C’est le sens que nous avons cherché à exprimer dans notre traduction.

Verset 31. Tance la bête des roseaux, l’assemblée des puissants avec les veaux des peuples, qui se prosternent avec des lingots d’argent : disperse les peuples qui se plaisent aux combats!

Le sens général de ce verset n’est pas difficile à comprendre : le psalmiste demande à Dieu de soumettre par sa puissance les ennemis du peuple d’Israël. Mais il y a de l’obscurité dans les détails. — La bête des roseaux représente sans doute une puissance ennemie de Dieu et de son peuple, de même que les bêtes dans Daniel et dans l’Apocalypse. L’épithète : des roseaux (c’est-à-dire, qui habite dans les roseaux), paraît désigner le crocodile, ou peut-être, selon Hengstenberg, l’hippopotame, et comme ces animaux se trouvent plus particulièrement en Égypte, sur les bords du Nil, c’est probablement l’Égypte ou son roi que le psalmiste a voulu indiquer par ce symbole[4]. — D’autres ennemis redoutables sont représentés par le mot puissants. Le psalmiste a probablement pensé à des taureaux, comme dans Ps 22.13, et voulu par cette image représenter les princes, les chefs, tandis que les peuples sur lesquels ils règnent sont représentés par les veaux. L’expression : les veaux des peuples est équivalente à celle-ci : les veaux, qui sont les peuples. C’est l’explication ordinaire. La version chaldéenne en donne une autre qui présente également un sens très naturel : les puissants qui s’appuient sur les veaux des peuples. Ce serait une allusion aux veaux qui étaient chez les Égyptiens un objet d’adoration. Mais il faut alors introduire un verbe (s’appuyer, se confier) qui ne se trouve pas dans l’original. — Le troisième hémistiche doit indiquer la conséquence de la soumission des ennemis ; ils sont représentés comme venant offrir au vrai Dieu tout ce qu’ils ont de plus précieux, idée déjà exprimée dans le verset précédent. La traduction serait plus claire, mais moins littérale, si l’on disait : afin qu’ils se prosternent avec des lingots d’argent. — Dans l’original le premier verbe du quatrième hémistiche est au passé ; mais en hébreu cette forme du verbe s’emploie quelquefois pour exprimer l’impératif, et c’est ce dernier sens qui lui est donné ici par d’anciennes versions ; c’est aussi celui qui s’accorde le mieux avec le commencement du verset. Cependant on pourrait aussi lui laisser son sens ordinaire et penser que le psalmiste a voulu exprimer ce que Dieu a coutume de faire ou bien ce qu’il fera dans l’avenir (passé prophétique).

Verset 32. De grands personnages viendront d’Égypte, l’Éthiopie s’empressera d’étendre ses mains vers Dieu.

La conversion de l’Égypte à la connaissance du vrai Dieu est également annoncée dans Es 19.18-25, celle de l’Éthiopie dans Ps 87.4. La conversion de ce dernier pays commença probablement par celle de l’officier de la reine Candace. Ac 8.27-40. — Étendre les mains, selon quelques commentateurs, représente seulement l’attitude de la prière ; mais il s’agit plutôt d’offrandes apportées, comme dans les versets précédents.

Verset 33. Royaumes de la terre, chantez à Dieu, faites résonner les instruments pour le Seigneur (Sélah),

Invitation semblable à celle de Ps 66.1. Comp. Ps 2.8.

Verset 34. qui est porté sur les cieux, les cieux antiques! Voici, il fait entendre sa voix, une voix éclatante.

Les cieux sont appelés antiques, parce que Dieu y a sa résidence de toute éternité. — « Le psalmiste emploie la particule voici, afin de nous réveiller de notre paresse en nous plaçant en présence de l’événement » (Calvin). — Nous savons ce qu’il faut entendre par la voix de Dieu d’après Ps 29.3.

Verset 35. Donnez la force à Dieu! Sa splendeur est sur Israël et sa puissance dans les nuées.

Le premier hémistiche a le même sens que Ps 29.4.

Verset 36. Depuis les sanctuaires tu te fais redouter, ô Dieu, Dieu d’Israël! C’est Lui qui donne au peuple force et puissance. Béni soit Dieu!

La fin de ce Psaume rappelle la fin du Ps 29. — Nous avons déjà vu fréquemment dans les Psaumes l’idée que le temple (sanctuaire) était le foyer et le point de départ des manifestations de la puissance de Dieu. Comp. Ps 3.5, 20.3, etc. — Calvin fait remarquer que le mot sanctuaire est au pluriel, parce que le tabernacle (et le temple qui le remplaça) était partagé en trois parties : parvis, lieu saint et lieu très saint.

Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes, p. 427-446


[1] En hébreu il n’y a qu’un simple pronom se rapportant à un substantif qui est sous-entendu, et que nous avons été obligé d’exprimer dans notre langue (la terre).

[2] On peut traduire aussi : Tu (ô Dieu) rends blanc de neige sur le Tsalmon ; parce qu’en hébreu le verbe se trouve sous une forme qui exprime à la fois la seconde personne du singulier masculin et la troisième personne du singulier féminin.

[3] Stier suppose que cette pensée peut avoir été suggérée à David par la distribution de dépouilles qu’il fit lui-même au peuple après la translation de l’arche (2 S 6.19).

[4] Le premier hémistiche est traduit par les rabbins Abenesra et Kimchi, par Calvin et par la version anglaise : Tance la troupe armée de roseaux. Mais notre traduction, adoptée par tous les commentateurs modernes, donne un parallélisme plus complet avec le second hémistiche, où les puissances ennemies sont représentées par des animaux.

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  1. Merci pasteur pour le message qui me va droit au coeur ,Que Dieu vous bénisse

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