- Cantique de la dédicace de la maison. Pour David.
- Éternel, je t’exalterai, parce que tu m’as tiré en haut, et que tu n’as pas réjoui mes ennemis à mon sujet.
- Éternel, mon Dieu, j’ai crié à toi et tu m’as guéri!
- Éternel, tu as fait remonter mon âme des Enfers, tu m’as rappelé à la vie d’entre ceux qui descendent au tombeau.
- Chantez à l’Éternel, vous ses adorateurs, et célébrez la mémoire de sa sainteté!
- Car en sa colère, il n’y a qu’un moment, mais en sa bienveillance toute une vie! Les pleurs logent le soir, au matin, c’est un chant de triomphe!
- Et moi, j’avais dit dans ma sécurité : « Jamais je ne serai ébranlé! »
- Éternel, par ta faveur tu avais affermi ma montagne ; tu cachas ta face, je fus éperdu.
- Je criai à toi, ô Éternel, et j’adressai mes supplications à l’Éternel.
- A quoi profilerait mon sang, ma descente au tombeau? La poudre te célèbrera-t-elle? Annoncera-t-elle ta vérité?
- Éternel! écoule et aie pitié de moi! Éternel, sois-moi secourable!
- Tu as changé mes lamentations en danses, tu as détaché mon sac et tu m’as ceint de joie :
- afin que la gloire te chante et ne se taise point. Éternel, mon Dieu, je veux te louer éternellement!
On ne voit pas au premier abord comment le contenu de ce Psaume s’accorde avec son titre. Il n’y est point question de la dédicace d’un édifice quelconque. David y rend grâces à Dieu de l’avoir délivré de quelque épreuve qui avait réveillé en lui un vif sentiment de ses péchés, de sa faiblesse et de l’instabilité des choses humaines. L’explication la plus simple nous paraît être la suivante. On peut supposer que ce Psaume fut composé en vue de la consécration solennelle de l’aire d’Oman, Jébusien, sur laquelle le temple (la maison de l’Éternel) devait être construit (2 S 24.18-25 ; 1 Ch 21.18-28, 22.1) et que l’épreuve à laquelle il faisait allusion était la maladie mortelle dont le peuple avait été frappé peu auparavant à cause du dénombrement ordonné par David, un moment enivré de sa prospérité et de sa puissance. A l’appui de cette supposition, on peut faire remarquer que le psalmiste confesse (verset 7) qu’il s’était trop confié en ses propres forces et qu’il avait perdu de vue sa dépendance envers Dieu ; le verset 12 peut se rapporter aux signes de deuil et d’humiliation dont David et les anciens du peuple se revêtirent à l’occasion de cette grande calamité publique. 1 Ch 21.16.
Ce Psaume étant destiné à célébrer la miséricorde de Dieu qui abrège les châtiments et les fait cesser dès qu’ils ont produit leur effet et que le pécheur revient à lui avec repentance et avec foi, peut convenir à des circonstances historiques analogues à celles pour lesquelles il fut composé. C’est ainsi que nous pouvons nous représenter qu’il fut chanté de nouveau lors de la consécration du temple de Salomon (1 R 8) et peut être lors de celle du second temple et que l’on en fera encore usage lors de la restauration du peuple d’Israël et de la dédicace d’un nouveau temple. Il y a toujours, pour le peuple de Dieu, des péchés à confesser et des actions de grâces à rendre.
Nous avons traduit le titre comme le font les rabbins Jarchi et Kimchi et la plupart des commentateurs modernes. Le rabbin Abenesra et après lui Calvin et quelques autres adoptent une construction un peu différente et traduisent : Cantique de la dédicace de la maison de David. Il ne s’agirait plus alors du temple, mais du palais de David (2 S 5.11, 7.2), et on pourrait supposer que ce prince avait été gravement malade peu de temps avant l’achèvement et la consécration religieuse de cet édifice. Mais cette traduction est moins conforme aux usages de la langue. Le nom de David est précédé d’une préposition qui ne se place pas ordinairement devant le nom du possesseur d’une maison.
Dans la première strophe le psalmiste rappelle en peu de mots la délivrance dont il a été l’objet (2-4) ; dans la suivante il invite tous les fidèles à se joindre à ses actions de grâces (5-6) ; dans la troisième il avoue qu’il avait mérité d’être humilié (7-9) ; dans la quatrième il rapporte la prière qu’il avait adressée à Dieu dans cette détresse et en raconte l’exaucement (10-13).
Versets 2-4. Éternel, je t’exalterai, parce que tu m’as tiré en haut, et que tu n’as pas réjoui mes ennemis à mon sujet. Éternel, mon Dieu, j’ai crié à toi et tu m’as guéri! Éternel, tu as fait remonter mon âme des Enfers, tu m’as rappelé à la vie d’entre ceux qui descendent au tombeau.
« Tu m’as tiré en haut. » Expression qui se trouve expliquée par le verset 4. Comp. Ps 28.1. — Quelques commentateurs prennent les mots tu m’as guéri dans leur sens littéral et en infèrent que le psalmiste veut parler d’une maladie dont il aurait été lui-même atteint ; mais cette expression peut aussi avoir un sens figuré. Ex 15.26 ; Es 6.10. — Sur les enfers voyez Ps 6.6.
Verset 5. Chantez à l’Éternel, vous ses adorateurs, et célébrez la mémoire de sa sainteté!
Chaque bienfait que le fidèle reçoit de Dieu lui donne occasion de penser à ses frères. Comp. Ps 9.12, 22.24.
Verset 6. Car en sa colère, il n’y a qu’un moment, mais en sa bienveillance toute une vie! Les pleurs logent le soir, au matin, c’est un chant de triomphe!
Le verset 6 énonce un fait dont on reconnaît mieux l’évidence à mesure que l’on avance dans la vie spirituelle. Comme le dit Calvin, c’est notre impatience et notre ingratitude qui font que les châtiments de Dieu nous paraissent beaucoup plus prolongés que les témoignages de sa bonté, tandis que c’est réellement le contraire qui a lieu. Considérons aussi que les épreuves, même les plus longues, sont de courte durée, si on les compare à la vie éternelle. Comp. Es 54.7 ; Ps 126.5 ; Jn 16.20 ; 2 Co 4.17. Le psalmiste emploie, pour faire comprendre sa pensée, une image aussi belle qu’ingénieuse. Il compare les châtiments de Dieu à un voyageur qui ne fait que passer la nuit dans une maison et qui, dès le matin, y est remplacé par un hôte tout différent.
Verset 7. Et moi, j’avais dit dans ma sécurité : « Jamais je ne serai ébranlé! »
Le psalmiste confesse qu’il était tombé dans un état d’âme fâcheux, dont il avait eu besoin d’être réveillé par une forte secousse. Une prospérité prolongée produit souvent cet effet ; il nous arrive facilement de nous complaire dans la pensée de notre habileté et de notre mérite et de nous croire nous-mêmes les auteurs de notre bonheur, ou bien de nous imaginer que Dieu nous a fait une position exceptionnelle ; alors nous négligeons la vigilance, la prière, et notre cœur s’attache toujours plus aux biens de ce mondé. Comp. Dt 8.11-18, 32.15. « Plus Dieu nous traite avec douceur, et plus nous devons nous tenir en garde contre cette tentation » (Calvin).
Verset 8. Éternel, par ta faveur tu avais affermi ma montagne ; tu cachas ta face, je fus éperdu.
Une montagne est souvent dans l’Écriture l’image d’une puissance, d’un empire. Le psalmiste avait peut-être en vue son royaume ou bien sa prospérité.
Versets 9-11. Je criai à toi, ô Éternel, et j’adressai mes supplications à l’Éternel. A quoi profilerait mon sang, ma descente au tombeau? La poudre te célèbrera-t-elle? Annoncera-t-elle ta vérité? Éternel! écoule et aie pitié de moi! Éternel, sois-moi secourable!
Par l’épreuve, David fut poussé à prier, et sa prière est reproduite dans les versets 10 et 11. Le motif sur lequel elle se fonde, le désir de pouvoir pendant longtemps encore servir Dieu sur la terre, a été expliqué à l’occasion de Ps 6.6. — « La poudre. » Comp. Gn 3.19.
Verset 12. Tu as changé mes lamentations en danses, tu as détaché mon sac et tu m’as ceint de joie :
Le « sac » était un vêtement d’une étoffe grossière et de couleur foncée qui se portait en signe de deuil et d’humiliation. Voyez 2 S 3.31 ; 1 R 21.27 ; Dn 9.3. — Il s’agit des « danses » ou processions qui faisaient partie des cérémonies religieuses. 1 S 21.11 ; 2 S 6.16.
Verset 13. afin que la gloire te chante et ne se taise point. Éternel, mon Dieu, je veux te louer éternellement!
Ce verset indique le but que Dieu se propose quand il délivre les fidèles. — C’est encore son âme, la partie la plus noble et la plus excellente de lui-même que le psalmiste appelle dans ce passage la gloire. Comp. Ps 7.6, 16.9. Selon d’autres, gloire serait une locution abrégée pour cantique qui glorifie.
Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes, p. 228-231
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