Psaume. Pour David.
- Ô Éternel! écoute ma prière, prête l’oreille à mes supplications, en ta fidélité, en ta justice, réponds-moi!
- Et n’entre pas en jugement avec ton serviteur ; car aucun vivant n’est juste devant toi.
- Oui, l’ennemi poursuit ma personne, il foule sur la terre ma vie, il me fait asseoir dans les ténèbres, comme les morts d’éternité.
- Mon esprit est assombri au-dedans de moi, mon cœur se trouble en mon sein ;
- je me ressouviens des jours d’autrefois, je pense à tous les ouvrages, je médite sur les œuvres de tes mains ;
- j’étends mes mains vers toi, mon âme a soif de toi comme une terre altérée.
- Hâte-toi de me répondre, ô Éternel! mon esprit se consume, ne me cache point ta face, pour que je ressemble à ceux qui descendent dans la fosse.
- Fais-moi connaître au matin ton amour, car en toi je me confie ; montre-moi le chemin où je dois marcher, car vers toi j’élève mon âme.
- Délivre-moi de mes ennemis, ô Éternel! Chez toi je me mets à couvert.
- Enseigne-moi à faire ce qui te plaît, car tu es mon Dieu! Que ton bon esprit me conduise sur la terre de droiture!
- À cause de ton nom, ô Éternel! tu me vivifieras par ta justice, tu tireras mon âme de la détresse.
- En ton amour tu extermineras mes ennemis, et tu feras périr tous ceux qui serrent mon âme, car je suis ton serviteur.
Ce psaume, l’un des plus beaux et des plus édifiants du recueil, a eu le sort d’être singulièrement maltraité par les docteurs rationalistes, qui ne veulent pas admettre qu’il puisse être de David et de son époque, tandis que tout lecteur droit et impartial reconnaîtra qu’il n’en est guère qui s’accorde mieux avec tout ce que nous savons du roi prophète par les livres historiques et par ses autres Psaumes. Il y a tout lieu de croire qu’il fut composé comme les précédents pendant la persécution de Saül. La version des Septante a ajouté au titre : dans sa fuite devant Absalon ; mais c’est une simple conjecture.
L’Église a classé ce Psaume parmi les Psaumes pénitentiaux, et c’est avec raison, car il est de ceux dans lesquels on voit ressortir avec le plus de clarté l’idée de la repentance et de la confiance en Dieu seul, telle qu’elle était comprise par les fidèles de l’ancienne alliance. Nous voyons le psalmiste reconnaître que l’homme ne peut pas être justifié devant Dieu par ses propres mérites (v. 2) et qu’il doit par conséquent fonder tout son espoir sur la miséricorde divine (v. 8) et implorer le secours du Saint-Esprit pour pouvoir marcher dans le chemin de l’obéissance et du bonheur (v. 10). « Ce Psaume est une prière d’un usage général pour obtenir secours, pardon, direction » (Calvin). Assurément ce Psaume, comme tous les autres, a un caractère typique et nous pouvons y trouver le langage du Messie souffrant ; cependant on ne serait pas fondé à l’appliquer à Notre Seigneur exclusivement, comme le fait un commentateur anglais, Rylandt ; c’est toujours David et ses circonstances qui se trouvent sur le premier plan, et l’application à Israël ne doit pas non plus être exclue.
Après une courte invocation (1-2), le psalmiste expose sa triste condition (3-6) ; la troisième strophe renferme la prière proprement dite (7-12).
Verset 1. Ô Éternel! écoute ma prière, prête l’oreille à mes supplications, en ta fidélité, en ta justice, réponds-moi!
Dans ce passage la justice de Dieu est nommée comme celle de ses perfections qui le porte à venir au secours des fidèles.
Verset 2. Et n’entre pas en jugement avec ton serviteur ; car aucun vivant n’est juste devant toi.
L’épreuve réveille chez le psalmiste le sentiment de ses péchés, la conviction que, si Dieu voulait le traiter selon sa stricte justice (entrer en jugement), il n’aurait aucun espoir d’être délivré. (Même ordre d’idées que dans Ps 130.) « Avant tout il faut demander pardon, car devant Dieu on est toujours coupable. On reconnaît bien la doctrine de la misère de l’homme, mais peu de gens y croient réellement. Entre la justification par la foi et la justification par les œuvres, il n’y a pas de milieu » (Calvin). — La grande vérité énoncée dans le second hémistiche est reproduite dans Jb 9.2 ; Rm 3.20.
Verset 3. Oui, l’ennemi poursuit ma personne, il foule sur la terre ma vie, il me fait asseoir dans les ténèbres, comme les morts d’éternité.
Par ennemi il faut entendre tout ce qui menace notre bonheur présent et éternel, et surtout le grand Adversaire, l’Ennemi par excellence, aux plus rudes assauts duquel le Seigneur Jésus s’est exposé, afin de nous en délivrer. — L’expression : morts d’éternité peut signifier morts pour toujours, ou bien (ce que la plupart préfèrent) morts depuis si longtemps qu’on ne se souvient plus d’eux. Ps 88.6.
Verset 4. Mon esprit est assombri au-dedans de moi, mon cœur se trouble en mon sein ;
Assombri. Comp. Ps 102.1. — Le second hémistiche rappelle la précieuse parole du Sauveur : Jn 14.1.
Verset 5. je me ressouviens des jours d’autrefois, je pense à tous les ouvrages, je médite sur les œuvres de tes mains ;
« Le psalmiste n’était pas de fer, néanmoins il continuait la lutte » (Calvin). Il cherchait un remède dans la considération des œuvres de Dieu, plus particulièrement des délivrances accordées à lui-même ou à d’autres fidèles. Même ordre d’idées que dans Ps 77.6,12.
Verset 6. j’étends mes mains vers toi, mon âme a soif de toi comme une terre altérée.
Belle comparaison que nous avons déjà dans Ps 63.2.
Verset 7. Hâte-toi de me répondre, ô Éternel! mon esprit se consume, ne me cache point ta face, pour que je ressemble à ceux qui descendent dans la fosse.
« L’abattement ne l’empêche pas de s’élever à Dieu » (Calvin). — Le premier hémistiche rappelle Ps 84.3, le second Ps 13.2.
Verset 8. Fais-moi connaître au matin ton amour, car en toi je me confie ; montre-moi le chemin où je dois marcher, car vers toi j’élève mon âme.
Au matin, c’est-à-dire promptement. Comp. Ps 59.17. — Par le chemin où il doit marcher le psalmiste entend ici le moyen d’être délivré ; ce n’est que plus tard (v. 10) qu’il en vient à parler du chemin de l’obéissance. — Élever l’âme vers Dieu, comp. Ps 25.1.
Verset 9. Délivre-moi de mes ennemis, ô Éternel! Chez toi je me mets à couvert.
Comp. Ps 27.5, 91.4, et la touchante image de Mt 23.37.
Verset 10. Enseigne-moi à faire ce qui te plaît, car tu es mon Dieu! Que ton bon esprit me conduise sur la terre de droiture!
« Prière très convenable, car dans l’épreuve nous sommes souvent tentés de chercher des remèdes illicites » (Calvin). — Le second hémistiche fait appel à l’adoption, aux promesses de Dieu. — Dans le troisième il parle du Saint Esprit (comp. Ps 51.12-14, 104.30). — Par terre de droiture il faut avec Kimchi entendre le chemin droit, le chemin de la sainteté. Comp. Ps 27.11.
Verset 11. À cause de ton nom, ô Éternel! tu me vivifieras par ta justice, tu tireras mon âme de la détresse.
À cause de ton nom. Expliqué à l’occasion de Ps 23.3. — Justice, comme au verset 1.
Verset 12. En ton amour tu extermineras mes ennemis, et tu feras périr tous ceux qui serrent mon âme, car je suis ton serviteur.
La confiance du psalmiste est telle qu’il envisage la délivrance comme un fait accompli. — Pour le dernier hémistiche, comp. Ps 116.16.
Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes – Tome 2, p. 354-357