- Lorsqu’Israël sortit de l’Égypte, la maison de Jacob du milieu d’un peuple barbare,
- Juda devint sa propriété sainte, Israël son domaine.
- La mer le vit et s’enfuit, le Jourdain retourna en arrière,
- les montagnes bondirent comme des béliers, les collines comme des agneaux.
- Qu’aviez-vous, ô mer! pour t’enfuir, ô Jourdain, pour retourner en arrière,
- vous, montagnes, pour bondir comme des béliers, et vous collines, comme des agneaux?
- Sois angoissée, ô terre! en présence du Seigneur, en présence du Dieu de Jacob,
- qui transforme le rocher en étang d’eaux, le caillou en source d’eau.
Destiné à être pour Israël un mémorial de la grande délivrance à laquelle il devait sa liberté et son existence comme peuple, ce psaume devait lui être particulièrement précieux ; aussi, comme nous l’avons déjà dit (introduction au Ps 113), il se chantait avant de manger l’agneau pascal. Mais la sortie d’Égypte étant un type à la fois de la rédemption accomplie quinze siècles plus tard sur le Calvaire et de la restauration encore à venir de la postérité d’Abraham (Dt 30.3-5), ce Psaume est aussi une prophétie, et il ne convient pas moins à l’Église qu’au peuple de l’ancienne alliance. Aussi, dans l’Église anglicane, il se lit le jour de Pâques, et dans l’Église romaine, tous les dimanches à vêpres.
Quatre strophes, de deux versets chacune, sont distinctement marquées. La première raconte la délivrance (1-2). La seconde rappelle la participation de la création à ce grand événement (3-4). Dans la troisième, qui est une répétition littérale de la seconde sous forme d’interrogation, le poète sacré, usant d’une figure hardie, s’adresse à la mer, au Jourdain, aux montagnes, et leur demande la cause de cette participation (5-6). La quatrième renferme la réponse qu’il se donne lui-même ; c’était la présence de l’Éternel, intervenant pour sauver son peuple, qui causait cette perturbation dans l’ordre de la nature (7-8).
Verset 1. Lorsqu’Israël sortit de l’Égypte, la maison de Jacob du milieu d’un peuple barbare,
« Ce bienfait était si considérable qu’il n’est pas étonnant qu’il soit souvent rappelé » (Calvin). — Il y a littéralement : du milieu du peuple au langage étrange. Comp. Ps 81.6 ; Dt 28.49.
Verset 2. Juda devint sa propriété sainte, Israël son domaine.
Le mot hébreu (kodesch), que nous rendons ici par propriété sainte, est celui qui se traduit ordinairement par sainteté, mais il signifie aussi chose sainte, consacrée à Dieu, enfin sanctuaire. Ce passage rappelle qu’Israël devait être un royaume de sacrificateurs, une nation sainte. Ex 19.6. C’est aussi ce que doit être le peuple de la nouvelle alliance. 1 Pi 2.9. « Par le baptême (dont le passage de la mer Rouge et du Jourdain étaient des types) nous nous séparons du monde, de ses coutumes, de son langage, pour devenir le temple de Dieu et son royaume » (Horne). « Un peuple racheté de cette manière ne s’appartient plus à lui-même » (Calvin).
Verset 3. La mer le vit et s’enfuit, le Jourdain retourna en arrière,
Allusion à Ex 14.21 ; Jos 3.14-16.
Verset 4. les montagnes bondirent comme des béliers, les collines comme des agneaux.
Sinaï et les montagnes avoisinantes furent ébranlées lors de la promulgation de la loi. Ex 19.18. — Image semblable dans Ps 29.6.
Versets 5-6. Qu’aviez-vous, ô mer! pour t’enfuir, ô Jourdain, pour retourner en arrière, vous, montagnes, pour bondir comme des béliers, et vous collines, comme des agneaux?
« Par cette interpellation adressée à des créatures destituées d’intelligence, le psalmiste veut faire ressortir l’aveuglement et l’ingratitude des hommes qui ne savent pas discerner les signes de la présence de Dieu et obéir à ses appels. C’est donc proprement à NOUS que cette question est adressée » (Calvin).
Verset 7. Sois angoissée, ô terre! en présence du Seigneur, en présence du Dieu de Jacob,
Le premier verbe est le même que dans Ps 77.17, 96.9. Il est à remarquer qu’il est à l’impératif et non au passé, ce qui nous avertit que les merveilles racontées dans les versets précédents et dans le suivant doivent encore se reproduire aux derniers jours. Comparez l’explication de Ps 66.6.
Verset 8. qui transforme le rocher en étang d’eaux, le caillou en source d’eau.
Allusion à Ex 17.6.
Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes – Tome 2, p. 225-227